Aujourd’hui, un ami plein de bonne volonté, me conseillait la course à pieds : « C’est le moyen le plus efficace pour aller mieux très vite », précisait-il. Oublions le fait que je manque d’énergie pour marcher jusqu’en haut de ma rue alors courir, n’en parlons pas, et attardons-nous sur l’idée du jogging.
Chaque fois que je vois quelqu’un trotter en tenue de sport (je précise, parce que les gens qui piquent un sprint pour attraper le bus, je comprends… enfin, je les comprends plus que les joggeurs), je me demande « Mais… pourquoi ?! »
Où vont-ils ? Nulle part. Ils tournent en rond. Parce que oui, on part du point A pour y revenir. Rares sont ceux qui courent pour aller au bureau, même si je suis certaine qu’il y en a. Non, les gens qui courent partent d’un endroit et au bout de X minutes ou kilomètres, reviennent à ce même endroit. Je suis évidemment bien consciente que c’est bon pour la santé mais… pourquoi courir ? C’est tellement horrible.
Je me revois au cours de gym en secondaires. Déjà, on courrait souvent autour du bloc en uniforme de gym, collant et t-shirt, le look que toute adolescente en pleine croissance rêve d’arborer, mais en plus, on devait inspirer par le nez et expirer par la bouche. J’étais au bord de la syncope à chaque fois que j’essayais d’appliquer la technique.
– Maria, inspire par le nez, j’ai dit !, me criait la prof de gym qui ne courrait jamais mais était toujours en training.
– Mais je peux pas, madame ! Je n’ai pas assez d’air !
– Par le nez, j’ai dit !
– Mais je vais mouriiiiiir !
Elle me prenait pour une dramaqueen fainéante. Si ce n’était pas tout à fait faux, ce n’est qu’au mois de juin de ma rhéto, suite à la rencontre fortuite de mon nez avec une porte entrebâillée, qu’un ORL m’a annoncé que j’avais une déviation nasale.
– C’est la porte qui a fait ça ?
– Non, ça doit être de naissance. Vous ne pouvez respirer que d’une narine. Il faudra opérer un jour.
– Je l’avais dit à ma prof de gym !
Mais bon, l’école, c’était fini et je n’avais plus de raison de courir ; plus personne ne m’y obligeait. J’ai alors aussi décidé de ne plus le faire pour attraper le bus. Tant pis si je le voyais s’éloigner, un autre arriverait. Si j’étais en retard, j’assumais ; c’était de ma faute.
Quelques années plus tard, ma croissance finie, j’ai subi la fameuse opération. Le lendemain de celle-ci, je me plaignais des douleurs au chirurgien et tout en tripotant mes pansements, il a hoché la tête :
– C’est normal. On vous a quand même cassé la cloison nasale.
Whaaaat ? Il avait évité de me préciser ça au préalable. Finalement, je lui en étais reconnaissante. Après quelques jours, il a pu me retirer les tampons des narines (si, si, c’est bien les tampons que vous imaginez). J’ai failli tourner de l’œil et me suis très vite retrouvée la tête en bas et les pieds en hauteur dans le fauteuil de consultation. Quand le vertige est passé, le docteur a relevé le siège et m’a demandé d’inspirer par le nez. Je n’avais pas encore osé. Je me suis exécutée et ouah… une bouffée d’air pur (ou d’essence de parfum d’hôpital, question de point de vue) m’a traversé les sinus des deux côtés.
– Je respire, docteur.
– C’était le but.
J’aurais pu me mettre au jogging en sortant de là. Après tout, je ne risquais plus de manquer mourir, mais pourquoi l’aurais-je fait ? Courir, c’est horrible.
Enfin, entendons-nous : je n’ai rien contre les joggeurs. J’ai des amis joggeurs. Ce sont des gens bien que j’admire pour un tas de choses et pas seulement parce qu’ils courent. Mais je crois que je ne les comprendrai jamais. Comme les gens qui klaxonnent dans les embouteillages.
Mais ça, c’est une autre histoire.

Une réflexion sur “Mavi déteste courir”