Le titre est long. Vous comprendrez pourquoi.
En ce moment, j’étudie un sujet qui me tient à cœur : le bonheur au travail. C’est un véritable cours de psycho, avec références scientifiques, études statistiques et tout et tout. Si certains points me semblent évidents, d’autres me surprennent. Non, je ne sais pas tout, mais en étudiant la totalité, force est de constater que je ne connais pas le détail : moi. Je m’explique.
Un des 4 piliers du bonheur au travail est la résilience. Je pensais en faire preuve. Je m’aventurerais même à dire que, dans mon entourage, on serait d’accord. Ben, on ne devrait pas en fait.
Je m’explique.
En étudiant comment booster sa résilience, le passage sur les habitudes mentales m’a laissée pantoise.
La première habitude pour favoriser la résilience est l’optimisme et une mentalité de développement. Alors, optimisme, check ! Je garde toujours espoir, je n’ai aucun problème à imaginer qu’au final, tout ira bien. C’est bien pour ça que trois semaines avant de m’effondrer, tel collègue me confiait d’un air ému qu’il était agréable de travailler avec moi parce que je gardais le sourire malgré tout. La mentalité de développement… Hum. Tout but peut être atteint grâce à l’effort et l’entraînement et n’est pas déterminé par le destin ou ses capacités naturelles. Ben oui, je suis d’accord. Théoriquement. Parce qu’en vérité, si je ne suis pas persuadée que ça marchera (« ça » peut être un but, un sport, une activité artistique, tout), je n’essaie même pas. « Vise la lune. Si tu rates, tu deviendras une étoile », je le dis, mais je ne l’applique pas. Je viserai la lune quand je serai certaine que j’y poserai le pied pour y faire un grand pas. En attendant, je fais mon spoutnik, merci.
Bon, la première habitude mentale, je maîtrise à moitié quand même… C’est bon, passons à la suivante. Et là, aïe : être satisfait. La notion directement définie comme « ne pas être perfectionniste ». J’essaie encore de me mentir : « Peut-être que je ne suis pas perfectionniste. Finalement, je ne m’attarde pas sur les détails. », mais on me remet les pieds sur terre très vite. Les perfectionnistes ont tendance à être workaholic. Pas moi ! Ils ont plus de difficulté à se détacher du travail. Ah, oui. Ils ont du mal à trouver un équilibre vie privé-vie professionnelle. Je me râcle à nouveau la gorge… c’est peut-être moi. Les « satisfaits » trouveront des solutions en se basant sur les ressources disponibles sur le moment. Ah la la… combien de fois n’ai-je pas dit qu’on ne faisait que mettre un sparadrap alors qu’on pouvait trouver une solution à long terme ! Tout à coup, tous ces collègues qui se satisfaisaient d’une résolution à court terme me sont apparu comme de grands sages. Bordel.
Allez, il me reste une habitude mentale à voir, je l’ai sûrement. « L’auto-compassion ». Mert (avec l’accent belge). Mon habitude à moi est son contraire : l’auto-critique. Le nombre de fois où je me suis traitée de c*nne… Incalculable. Oui, je pense qu’on se crée tous un talon d’Achille, celui dans lequel on aime donner un bon coup quand ça ne va pas. Le mien, c’est mon intelligence. En y repensant, même quand je me suis dit que tel gars n’était pas intéressé parce que j’étais grosse et moche, la pensée sous-jacente était « Comment ai-je pu croire qu’un gars comme ça s’intéresserait à moi ? Quelle c*nne. » Et ceci s’applique à tout trait qui justifierait le désintérêt : ma complexité, mon exubérance, mon authenticité, mon intensité… « Comment pourrait-on supporter ça ? Quelle c*nne. »
Et, plus récemment, après une râclée professionnelle de la part de quelqu’un qui manque clairement de compassion et d’empathie, j’ai dû prendre quelques jours à passer au-delà de la colère. Pourquoi tout ce temps ? Parce que ma rage était tournée contre moi « Quelle c*nne d’avoir cru qu’il était bienveillant ! ».
Cette auto-critique, je pensais l’avoir maîtrisée quand j’ai accepté mon burnout, quand j’ai admis que j’étais malade et que je devais me reposer, me laisser le temps. Je pensais l’avoir apprivoisée en m’empêchant la lecture de pensées, en me rappelant que ce que je crois que les autres pensent de mon état n’est qu’une supposition tintée de mes propres croyances. J’étais convaincue d’avoir franchi le cap, mais je réalise maintenant que j’ai tout simplement donné d’autres noms à ce jugement intérieur néfaste. Je l’ai appelé la culpabilité, par exemple. Je culpabilisais de ne pas être plus mentalement présente pour ma fille, j’étais une mauvaise mère (Rassieds-toi, toi qui m’aimes; je sais que tu n’es pas d’accord, moi non plus entretemps). Et quand j’ai essayé de reprendre une vie normale mais que mon état ne me le permettait pas tout de suite, j’ai culpabilisé de me tromper dans un numéro de téléphone ou une case Excel jusqu’à m’en rendre littéralement malade. Pourtant, je dis aux autres burnies « sois gentil(le) avec toi-même ». Mais qu’est-ce que cette poutre fait dans mon œil ?
Mais donc… quoi ? Je constate et c’est tout ? Non, hein, j’agis : je modifie mon dialogue intérieur. A partir de maintenant, quand je m’enfoncerai, j’écrirai à quelqu’un que j’aime. Je l’écrirai parce que l’exercice mental ne me suffit pas, il me faut l’ancrer. J’imaginerai que c’est une de mes sœurs ou une amie qui a vécu ce que j’ai vécu, qu’elle m’a écrit pour me raconter et que je lui réponds.
Parce que, comme la personne de la parenthèse, tous ceux qui m’aiment ont bondi quand j’ai raconté mes dernières aventures, étouffée par la culpabilité. Parce que j’aurais bondi aussi si la situation avait été inversée. Parce que, sérieusement, quand votre amie vous dit qu’elle a eu affaire à un c*nnard, vous ne lui balancez certainement pas à la figure « Mais qu’est-ce que tu croyais ? Que tu méritais mieux que ça ? T’es tellement c*nne. »
Je suis d’accord depuis longtemps avec l’idée d’agir avec moi-même comme je réagirais avec ma meilleure amie. Aujourd’hui, j’arrête la théorie et je passe à la pratique. Et je commence en corrigeant le titre qui à la base était « Mavi s’auto-détruit ».