Je ne sais pas quand ça a commencé, mais un jour, j’ai réalisé que quand je disais ce que j’avais sur le cœur, si mes mains ne tremblaient pas, j’avais mal aux bras. Comme après un effort soudain, comme si j’avais soulevé des poids… Je pense qu’il s’agit de la réponse « combat-fuite ». Mon corps se prépare à se battre, mes muscles répondent au danger, se tendent et se relâchent si vite qu’ils me laissent cette sensation désagréable de cordes tendues.
Le danger, c’est parler, avoir la gorge à découvert, exposer ma vulnérabilité. Le danger, c’est dire ma vérité, quitte à être rejetée.
Ça a l’air facile pour moi, mais je vous rappelle que j’ai l’impression de faire un arrêt cardiaque à chaque fois. Je n’ai pas le choix cependant dans ces moments-là : soit je parle, soit j’ai le cœur qui explose ; il n’y a plus d’entre deux. Les mains sur lesquelles je m’assieds pour cacher le tremblement, la voix chevrotante que je camoufle d’un raclement de gorge, cette goutte de sueur que je sens glisser trop lentement le long de ma colonne ou les bras qui m’en tombent… Mes peurs s’expriment physiquement mais je fais semblant de rien et je parle. Une fois lancée, je ne peux plus m’arrêter, même quand je m’ordonne « Tais-toi, Maria ! »
Je regrette parfois cet élan passionnel, ce besoin d’exprimer tout haut ce que tous se contentent de penser. Je me remets en question et m’en veux de ne pas pouvoir faire comme tout le monde et la fermer. Puis, je me rappelle à l’ordre. Dire ma vérité, c’est être moi.